Alors que la France sort progressivement de la crise sanitaire mais doit encore faire face aux conséquences économiques, Annie Pinault s’exprime. Depuis le siège lyonnais de la mutuelle MBTP, elle fait le point sur la gestion de cette période inédite : ses conséquences et les perspectives. Sa volonté première, est de prendre d’autant plus soin des adhérents particuliers et d’accompagner les entreprises du BTP face aux défis qu’elles doivent relever…
Comment MBTP a passé la crise que nous avons vécue ?
La période a été très intense et la majorité de nos collaborateurs a été mobilisée car, fidèles à notre engagement. Nous nous sommes organisés très vite pour être au plus proche de nos adhérents. L’objectif prioritaire a été de conserver le lien avec eux, et nous nous sommes particulièrement occupés des plus vulnérables. Nos équipes ont appelé chacun de nos adhérents de plus de 80 ans pour prendre des nouvelles. Il s’agissait d’évaluer s’ils étaient en situation d’isolement, sans famille et de les conseiller sur les habitudes à prendre. Au-delà des gestes barrières, nous les avons, par exemple, sensibilisés au bracelet connecté anti-chute de façon à pouvoir mobiliser des secours en cas de besoin. Ils ont été touchés par notre appel…
Plus généralement, pour l’ensemble de nos adhérents, nous avons fait plusieurs communications par téléphone, par mail et sur les réseaux sociaux afin de les guider et de répondre à leurs inquiétudes.
En ce qui concerne les entreprises, comment avez-vous réagi ?
Là aussi, le mot d’ordre a été la réactivité. Nos conseillers commerciaux ont pris contact avec toutes nos entreprises du BTP. Très tôt courant avril, nous avons commandé des masques. L’objectif n’était pas d’équiper tous les salariés de toutes les sociétés, mais d’aider les chefs d’entreprise à démarrer les chantiers en attendant que leurs propres commandes soient livrées. Nous avons fait les livraisons directement dans les entreprises. C’était un coup de pouce qui, là aussi, a été très apprécié.
Et quelles sont les actions et les mesures spécifiques qui ont été prises pour elles ?
Au début de cette période exceptionnelle, ce dont avaient d’abord besoin les entreprises, c’était de comprendre les dispositifs mis en place par les pouvoirs publics afin d’amortir l’arrêt de leur activité. Nous avons donc travaillé avec les membres des équipes commerciales et des équipes de gestion afin qu’elles puissent immédiatement aiguiller leurs interlocuteurs vers les bonnes informations que cela concerne les arrêts de travail, le chômage partiel ou les questions liées à la complémentaire santé.
Parallèlement nous avons produit et diffusé des articles en forme de guide ou de foire aux questions afin de les aider dans leurs prises de décision. Ensuite, la situation s’installant, il y a eu la mise en place de mesures d’urgence comme le report des cotisations pour les entreprises en difficulté et une aide d’accompagnement des artisans à hauteur de 120 euros par l’intermédiaire du Groupe APICIL.
En fonction de l’évolution de la situation, nous continuerons d’ailleurs à adapter notre accompagnement. Et puis, je souligne l’initiative de notre partenaire historique, la Fondation du BTP, qui a débloqué un fonds de solidarité afin de permettre aux salariés mis au chômage partiel de bénéficier des garanties de leur contrat collectif en santé et en prévoyance sans contrepartie de cotisation.
La relation avec vos adhérents a-t-elle évolué dans cette période ?
Oui bien sûr ! Depuis plus de 50 ans, la proximité est dans l’ADN de notre mutuelle et nous la cultivons au quotidien, mais là, cette relation que nous entretenons avec les dirigeants d’entreprises du BTP, les artisans, les particuliers, a passé un cap. Nous avons beaucoup échangé avec eux. Vu la situation, les sujets étaient logiquement plus profonds, plus personnels et avec certains il y a une forme de complicité qui s’est nouée.
Je dois d’ailleurs avouer qu’en voyant comment certains ont su réagir tout en conjuguant vie professionnelle et vie de famille, ont mis en œuvre des mesures d’urgence, des plans de formation pour leurs compagnons sur les chantiers, je suis admirative. Et cela me conforte dans l’idée que MBTP doit se positionner toujours plus dans l’accompagnement pour les aider à poursuivre leur activité, à se développer, à maintenir leurs emplois ! « Etre avec vous, pour construire un monde durable », voilà la raison d’être de la mutuelle MBTP, ô combien d’actualité dans le contexte inédit que nous traversons.
Justement, l’activité des secteurs du bâtiment et des travaux publics reprend de manière très progressive. Quels sont les échos qui vous remontent ?
Je n’ai pas les derniers chiffres, mais très clairement, les chantiers ont majoritairement repris. Les entreprises qui étaient saines avant le début de la crise vont s’en sortir, alors que celles qui étaient sur le fil du rasoir vont avoir de grosses difficultés même si elles bénéficient des aides et des prêts garantis par l’État. Pour toutes, la problématique est similaire : l’ensemble des mesures qu’elles doivent mettre en œuvre pour pouvoir redémarrer va les freiner pour retrouver le rythme de l’avant-crise.
L’autre difficulté vient du report des élections municipales. De nombreuses sociétés dépendent de la commande publique et leurs dirigeants redoutent qu’il y ait un nouveau trou d’air dans les commandes à partir de la rentrée. Cela fait beaucoup d’incertitudes pour eux !
Et au sein de votre mutuelle, comment se passe cette étape post-confinement ?
Je dirais que ça se passe bien. Nous n’avons eu à déplorer aucun cas de Covid-19 parmi nos effectifs. Et après cette longue période durant laquelle le télétravail a été la norme, l’ambiance est particulière et chaleureuse. Nos salariés reviennent progressivement. Heureux de les retrouver, nous leur souhaitons la bienvenue comme si c’étaient des gens nouveaux qui arrivaient ! D’ailleurs depuis mi-juin, tout le monde est au bureau au moins deux jours par semaine. Pour cela, l’ensemble des locaux a été adapté et équipé.
Que va-t-il rester de tout cela selon vous ?
Certaines méthodes de travail d’abord. Même si ce n’est pas possible pour tous les postes, nous nous sommes rendu compte que le travail à distance fonctionne et nous permet de rester proche de nos adhérents. Nous allons donc mettre en place un accord de télétravail au sein de l’entreprise. Nous avons déjà fait parvenir à tous les salariés un questionnaire portant sur leurs attentes. C’est ce qui nous permettra de créer ce cadre du télétravail conciliant efficience et performance au service de nos adhérents. … Ce qui va rester également, c’est le sentiment de ne pas être à l’abri d’une autre crise. Du coup, il y a un retour d’expérience qui est en cours et derrière, nous allons nous donner les moyens pour que, si un 2e virus arrivait, nous puissions tous ensemble gérer la situation de façon beaucoup plus sereine.
Pour une mutuelle, affronter une crise de ce type, c’est revenir aux fondamentaux. Pour les équipes y a-t-il une forme de fierté d’être utile ?
Je pense oui. Nous avons aidé, chacun avec notre champ d’action, ne serait-ce que par l’écoute, l’attention. Passer des appels simplement pour prendre des nouvelles, nous ne l’avions jamais fait. Ça été vécu de façon très positive par nos équipes parce qu’elles ont eu beaucoup de remerciements et d’échanges sympathiques. Et les adhérents ont pu se rendre compte que chez nous, ils ne sont pas des numéros de dossier, mais qu’ils sont vraiment considérés.
A titre personnel, en tant que dirigeante, comment traverse-t-on une telle période ?
D’une façon générale, le sentiment de responsabilité de la santé de ses collaborateurs, de l’équilibre financier de l’entreprise, du devoir d’accompagnement de ses adhérents, a été d’autant plus fort pendant ces 3 mois. Grâce à la mobilisation immédiate de l’encadrement en cellule de crise, nous avons su faire face et trouver des solutions pour maintenir une relation de qualité avec le personnel et avec nos adhérents. Nous avions des réunions hebdomadaires, et même quotidiennes au départ, pour faire remonter l’ensemble des sujets, des situations à gérer. Le fait de travailler ensemble, avec l’appui du Groupe APICIL, a permis une meilleure coordination dans la gestion de la crise. Il n’empêche que ces journées passées au téléphone ou en visio demandent beaucoup d’énergie et cela a été quand même une épreuve. Mais sur le plan humain, c’était aussi une période intéressante. Paradoxalement, l’éloignement a créé une proximité au sein des équipes. L’objectif premier était de garder le moral et il y a eu des efforts énormes de mobilisation. Encore une fois, après l’épreuve du changement de partenariat il y a 3 ans, notre mutuelle a montré sa résilience et sa solidité. Je tiens d’ailleurs à remercier chacun pour son engagement et sa contribution exemplaire!
Pensez-vous que cette crise va durablement changer l’univers des mutuelles ?
Difficile de le dire avec précision car tout cela est trop frais et que nous ne sommes pas encore sortis de la crise sanitaire et économique. L’un des premiers changements est sans doute la digitalisation de la gouvernance de la Mutuelle. En effet, je tiens à souligner l’engagement de nos administrateurs dont l’environnement a été fortement bousculé. Ils ont toujours été présents à nos côtés grâce aux outils numériques déployés, qui nous ont permis de tenir toutes nos réunions ainsi que l’assemblée générale. Ensuite, dans le cadre du plan stratégique avec le Groupe APICIL, nous menons déjà une étude sur les attentes post Covid-19 des adhérents. Ce qui est certain, c’est que cette situation a révolutionné certaines pratiques et cela aura un impact sur notre développement. Le recours aux téléconsultations a, par exemple, explosé et il y a l’arrivée de la 5e branche de la Sécurité sociale consacrée à la dépendance pour faire face aux dépenses liées à la perte d’autonomie. Autant d’évolutions que nous suivons de très près au sein de MBTP…
SP20/FCR0332